C’est l’histoire d’une région où la nature a repris ses droits. À Iberá, au nord de l’Argentine, des décennies de chasse et d’agriculture intensives avaient décimé la faune à l’aube des années 1980. Aujourd’hui, il s’agit du plus grand réservoir de biodiversité du pays, et même la star locale, le jaguar, a fait son retour. Un petit miracle nommé rewilding, orchestré par la fondation de Douglas Tompkins, créateur de The North Face.
À une cinquantaine de kilomètres de la sortie de la ville de Mercedes, la route asphaltée se transforme brutalement en un chemin en terre où mieux vaut s’aventurer en 4X4, et avec un chauffeur expérimenté. Les paysages de rizières et
de fermes font place à de vastes étendues inexploitées par l’homme. Un panneau signale au visiteur qu’il entre dans les 750 000 hectares du Parque Iberá. Et l’environnement devient sauvage. Les animaux apparaissent. Des hordes de capybaras, ces énormes rongeurs aux gueules débonnaires, se prélassent, insouciants, au bord de la route. Des nandous, lointains cousins de l’autruche, gambadent dans les prairies. Une loutre s’ébroue dans un petit ruisseau et un majestueux cerf des marais traverse la piste.
À mesure que défilent les kilomètres et que s’égrènent les deux heures et demie de route pour rejoindre le village de Colonia Carlos Pellegrini, la présence humaine devient quasiment insignifiante. Dans cette région difficilement accessible de la province de Corrientes, à 800 kilomètres au nord de Buenos Aires, elle se résume à quelques autels à la gloire du Gauchito Gil, un bandit de grand chemin devenu saint, que les Correntinos, habitants de la province, convoquent pour réclamer un miracle. Un miracle, c’est d’ailleurs bien ce à quoi ressemble l’histoire d’Iberá – dont le nom signifie “les eaux brillantes” en guarani, une langue indigène, qui cohabite avec l’espagnol dans la région. Deuxième plus grande zone marécageuse du continent après le Pantanal au Brésil, cet immense parc est aujourd’hui le plus grand réservoir de biodiversité d’Argentine. Difficile de croire qu’il y a à peine quelques décennies, il n’y avait quasiment aucun animal sur ces terres, à l’exception des vaches des estancias – ces grandes fermes aux allures de ranch –, des chiens et des chevaux des gauchos, les cow-boys locaux. L’histoire d’Iberá, c’est avant tout celle d’un endroit où la nature a repris ses droits.
La suite du reportage à découvrir dans le 12ème numéro de So good, disponible en kiosque ou à la commande.
Par Arthur Jeanne pour So good.