Créé en Normandie, le Producteur Local s’est depuis installé à Paris et à Caen. Un projet dont l’objectif est de pousser les Français à mieux consommer mais aussi d’aider les producteurs à entrer dans la transition écologique. Gagnant-gagnant, donc.
Le concept a de quoi séduire : des produits cultivés, élevés ou transformés à moins de 150 km de la boutique (80 km pour les produits frais), des prix justes pour les consommateurs et des revenus qui sont intégralement réservés aux producteurs. Ce modèle économique et juridique unique a été pensé par Claire Béhengaray-Pérez, aujourd’hui à la tête de cinq magasins ; à Bois-Guillaume, au Havre, à Belbeuf, à Paris (dans le XXe arrondissement) et à Caen. « On ne s’arrête pas là puisque le 5 décembre, nous allons faire l’ouverture du sixième point de vente à Beauvais, s’enthousiaste l’entrepreneuse. Et nous sommes à la recherche d’un local pour ouvrir une seconde boutique à Paris. » Claire était à mille lieux d’imaginer le potentiel de sa coopérative. Rien, en fait, ne la prédestinait à créer sa propre entreprise. « Je ne viens ni du milieu agricole, ni du milieu entrepreneurial », avoue-t-elle. En effet, la jeune femme possède un doctorat d’archéologie. Installée à Bordeaux pour ses études, Claire est une habituée des marchés bio et des AMAP. Mais lorsqu’elle rentre à Rouen, c’est la panique. Plus de marché bio et une liste d’attente longue comme le bras pour les AMAP. Un jour, alors qu’elle feuillète un magazine, Claire tombe sur un article sur des ruches. « À cet instant, je me suis dit : “Et pourquoi pas moi ? Ce n’est pas si compliqué, je vais le faire moi-même”. » Son nom était tout trouvé : la Ruche qui dit oui. « On était déclaré en associatif et je faisais ça à côté de ma thèse et de mes cours », raconte la jeune femme. Une fois sa thèse obtenue, Claire est confrontée à l’absence de postes dans sa section de recherches. Face à l’impossibilité de vivre de sa passion pour l’archéologie, Claire décide de tout lâcher pour se consacrer uniquement à ce qui désormais l’anime.
En 2015 elle inaugure le premier Producteur Local à Bois-Guillaume. 256 personnes se pressent tout de suite à l’entrée pour découvrir cette nouvelle façon de consommer. « Alors que nous attendions au mieux 250 personnes…en une semaine ! se souvient-elle. J’ai réalisé que nous avions nettement sous-estimé le potentiel. Après l’ouverture de notre magasin au Havre, il y a eu un phénomène nouveau : des particuliers sont carrément venus me démarcher pour reproduire le concept dans une autre ville. » Mais pas question pour Claire de franchiser le modèle car son efficacité repose sur le fait qu’il soit non-lucratif. « Franchiser revenait à retomber dans le système capitaliste. » C’est ainsi qu’est né le Local Ader, une SCIC faîtière qui accompagne les porteurs de projet. Ces derniers s’occuperont ensuite de la gestion des boutiques mises en place. « Grâce à ce nouveau modèle, nous avons pu accompagner la création du magasin de Paris et de Caen. » Aujourd’hui, le réseau du Producteur Local compte 150 producteurs, quatre salariés par structure et jusqu’à 1200 clients par semaine. Plus impressionnant encore, les quatre magasins réunis font en moyenne un million de chiffre d’affaires d’encaissement. « Je reviens de loin pourtant, s’amuse Claire. Je suis de la génération 80 et à la maison, c’était plutôt des cordons bleus avec des pâtes ! »